[Archive 2 décembre 2021]
À l’initiative de Mats Ek, les productions Albert Sarfati proposent au Théâtre des Champs-Elysées un programme de six pas de deux particulièrement alléchant, réunissant des chorégraphes parmi les plus grands noms de la danse contemporaine et d’excellents danseurs venus de différents horizons – le type d’initiative que l’on ne demanderait qu’à voir plus souvent.
Le programme s’ouvre sur Impromptus, une chorégraphie intéressante de Sasha Waltz mais dont l’aspect extrêmement rythmé, voire découpé, peine un peu à s’harmoniser avec l’impromptu de Schubert choisi, malgré la grande qualité des danseurs Claudia de Serpa Soares et Gyung Moo Kim. L’extrait de Juliet & Romeo de Mats Ek, plus lyrique, est proprement exécuté par Mariko Kida et Johnny McMillan. Mais c’est surtout Whitney Jensen que l’on remarque, épatante de précision dans 14’20’’ de Jiri Kylian, un duo plein d’énergie dans lequel Lucas Lima prouve également qu’il n’a pas volé sa toute récente nomination sur ce programme au titre de Principal du Ballet de Norvège. Tout comme Samantha Lynch, promue le même jour, lumineuse aux côtés de la même Whitney Jensen dans Islands d’Emma Portner, qui débute par un jeu d’imbrications siamoises non sans humour.

C’est justement ce superbe Islands, intelligent et rythmé, qui s’impose comme la grande réussite de ce programme, avec sa judicieuse scénographie entièrement basée sur les lumières et un langage ciselé qui n’est pas sans rappeler celui de Crystal Pite. Et c’est précisément l’un des objectifs affichés de cette soirée, que de faire dialoguer les différents chorégraphes en présentant leurs travaux au sein d’un même programme et en mettant ainsi en lumière leurs influences mutuelles. Objectif à moitié atteint, car à vrai dire il n’y a qu’entre ces deux chorégraphes que le dialogue des styles sera vraiment visible.
La création de Crystal Pite, quant à elle, était très attendue par le public parisien, qui a eu par deux fois un avant-goût de son talent sur la scène de l’Opéra de Paris et qui avait été particulièrement enthousiasmé par son Season’s Canon. Son Animation est un très intéressant travail chorégraphique autour de la mise en mouvement de l’inanimé, à travers une marionnettiste tentant de donner vie à son pantin. Bien qu’on éprouve une légère déception à ne pas retrouver là un rythme enlevé qu’elle a si bien su insuffler dans d’autres pièces, le résultat, époustouflant de recherche et de précision, confirme toute l’étendue de son talent.

La soirée se termine par le Boléro d’Ohad Naharin, qui est largement acclamé. Il faut dire que Maayan Shienfeld et Rani Lebzelter, anciennes de la Batsheva Dance Company, dansent parfaitement et avec esprit cette version contrastée mais énergique de l’œuvre de Ravel, largement remixée pour l’occasion.
Une soirée réjouissante, permettant de mettre en lumière à la fois le travail de plusieurs chorégraphes et les qualités des danseurs de différentes compagnies tout en donnant toutes ses lettres de noblesse au format du duo. On en redemande !
Tres interessant
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Très bien écrit, beaucoup de professionnalisme dans les explications, on sent bien que la connaissance est là.
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